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Le monde de Beñat/Beñaten mondua

Pourquoi laisser perdre les idées qui nous passent par la tête. Un moment de repos et notre imagination se met en route. Des images furtives du passé et du présent défilent associées à des gens ou à des actions, bref l’imaginaire est là. J’aimerai vous faire partager sur ce blog mes nouvelles, textes et articles. N’hésitez pas à réagir, bonne lecture.

Histoire de la première Pastorale à Zihigan / Cihigue. " Eñaut d’Elizagarray Pastorala "

La pastorale.

Un mystère médiéval transporté au  XXIème  siècle. L’association Bertz Xiloa a relevé le défi.

La pastorale Basque viendrait selon les historiens du théâtre grec. Comment 2300 ans plus tard la tragédie antique s’est elle perpétrée au travers de la pastorale où l’on retrouve tous les gestes et la manière de réciter les strophes. Les Basques seraient-ils Grecs ? Est-ce là le grand mystère de l’origine de ce peuple si particulier ou cela s’apparente-t-il à une légende ? Ce qui est sûr c’est que ce théâtre joué en plein air est apparu au Moyen Âge. Toujours en vigueur au XVIIIème siècle en Europe, il aurait pu s’éteindre mais les souletins ont gardé dans leur culture ce spectacle fait d’unité, de convivialité qui leur tient tant à cœur. Les puissances du bien et du mal régissent au Moyen Âge la vie des peuples. Lors des croisades les bons sont les Chrétiens et les mauvais les Musulmans. Dans la pastorale, les bons sont aussi les Chrétiens et les méchants les Turcs habillés de rouge. De chaque côté de la scène, une porte sert pour l’entrée des bons et une autre pour celle des  mauvais celle-ci est surmontée d'un pantin affreux plus exactement un diable appelé Mahomet ou Tervagant et qui gesticule de joie chaque fois que les méchants gagnent.

Histoire de la Pastorale

C’est à Armendaritz qu’est né en 1652, Renaud D’ELIZAGARAY. Issu d’une famille de cordonniers, il fut placé très jeune comme domestique dans des familles bourgeoises ; lesquelles ont contribué à son éducation. Après des études en mathématiques, il fut membre de l’académie des sciences et fit une brillante carrière de marin et d’ingénieur sous le règne de Louis XIV. Il travailla dans la construction navale à Brest où il inventa une machine à tracer les gabarits des vaisseaux et mit au point les galiotes à bombes. Cette arme permettait de tirer des projectiles à plus de trois kilomètres dans l’axe des navires. Elle sema la terreur lors des bombardements d’Alger et de Gènes en 1682.

Il participa aux inspections des flottes en Espagne au siège de Gibraltar et à la défense de Cadix.

L’auteur de la pastorale est l’abbé Junes CASENAVE HARIGILE né à Sainte-Engrâce et âgé de 83 ans, qui a déjà à son actif plusieurs pastorales à succès. C’est donc un homme de talent et d’expérience

Comme ses ainés, les villages de Sainte-Engrâce, d’Esquiule, de Barcus….

Camou-Cihique petit village Basque de 114 habitants au cœur de la Soule* à deux pas de Tardets a relevé le défi de mettre en place sa propre pastorale. Au départ, il existe juste l’envie et le désir fort de créer et de réaliser une œuvre théâtrale, de perpétrer la tradition, de ne pas la laisser disparaitre, ceci est devenu un défi. Outre l’aspect artistique, reste la partie la plus contraignante la plus difficile certainement, trouver le financement de l’opération et mettre en place l’organisation du spectacle.

Autour de ce projet culturel dont le but essentiel est de rassembler tous les villageois afin de les former à la danse au chant et à la langue basque. C’est un théâtre amateur qui est entièrement conçu, écrit et réalisé par des amateurs, qui est joué par des comédiens d’un jour. C’est une œuvre collective qui mobilise la plupart des habitants, soit en tant qu’acteurs, soit en tant que bénévoles, un théâtre populaire par ses héros qui sont toujours empruntés à l’histoire religieuse ou nationale et qui fait ainsi revivre les mythes, un théâtre entièrement basque.

Actuellement, la pastorale est limitée à une durée raisonnable (trois heures environ alors que jadis, elle couvrait la journée). Le public dont le nombre et l’exigence ont été décuplés, justifie des conditions d’accueil et de confort considérablement améliorées.

Tout ceci implique une organisation beaucoup plus structurée et, outre le nombre d’acteurs qui a également augmenté, l’organisation nécessite une mobilisation générale depuis les couturières jusqu’aux gardiens de parking en passant par les maquilleuses.

Dès janvier 2007 l’association a choisi la pastorale qui sera jouée durant l’été. Il va falloir faire vite, tout va se dérouler sur une période de six mois. Après avoir choisi le metteur en scène et le maître de chant, il va falloir s’occuper de l’organisation et de l’intendance. En premier il a fallu établir le budget prévisionnel, envoyer les dossiers de demande de subventions aux conseils régional et général et aux organismes basque. Lancer les appels aux sponsors, puis les demandes de devis pour les gradins, les boissons, la sonorisation et tout ce qu’il faut pour créer un tel spectacle.

Les répétitions commencées en janvier ont lieu tous les samedis soir. Les acteurs se rassemblent pour répéter dans une grange mise à disposition par une personne du village sous la direction du metteur en scène " l’Errejent " qui a déjà à son actif onze pastorales. Danseur de talent, il a aussi formé et dirigé de nombreux groupes de danseurs souletins.

Le metteur en scène  porte le nom curieux  d'instituteur de tragédie

Ce soir une centaine d’acteurs sont réunis. La répétition commence par les chants, il lui faut repérer les chanteurs les plus aptes à mener le spectacle et trouver celui qui aura le rôle principal, l’acteur qui va interpréter Eñaut d’Elizagarray. La pastorale est composée de vingt deux scènes psalmodiées, précédées d’un prologue de seize couplets et entrecoupée de danses, de chants, de ballets guerriers inspirés de la danse des bâtons de la province Biscayenne. Le metteur en scène va devoir distribuer les rôles en fonction des capacités des acteurs à réagir aux diverses scènes et à la façon dont ils les interprètent. Malgré le froid tous ces nouveaux artistes se prêtent avec bonne humeur et enthousiasme à l’apprentissage plusieurs fois répétées des différentes phases de la pastorale. Des villageois et des bénévoles sont là pour soutenir et encourager les acteurs et pour préparer après la répétition le petit casse-croûte pris en commun. Cet instant de détente ou après l’angoisse et la peur de mal faire tout le monde vient commenter et débattre des prestations de l’un ou de l’autre. Ce moment convivial qui forge la solidarité et le lien des habitants du village se termine tard dans la nuit par des chants improvisés comme savent si bien faire les Basques.

Les répétitions vont se poursuivre tous les samedis soir. Au mois d’avril le metteur en scène a distribué les rôles, dont celui d’Eñaut d’Elizagarray. Annoncé sur  la presse locale pour attiser l’envie des souletins et les autres personnes du pays basque à s’intéresser à ce nouveau spectacle, c’est le coup de départ médiatique de la pastorale.

Egalement tous les samedis dès le matin, dans l’unique classe de l’école du village s’affairent les couturières bénévoles venues créer les costumes des personnages historiques sous la direction d’un couturier basque Espagnol. C’est un travail fastidieux d’abord il a fallu faire des recherches sur les personnages, dessiner les patrons, trouver les tissus et procéder aux essayages. Ce fut une tache lourde et difficile,  pleine d’imprévus, un travail d’équipe soudée.

A l’extérieur sur l’emplacement choisi, les gradins, la scène, les tentes pour la restauration et le bar sont installés par les villageois. La première de la pastorale est jouée devant tout le village. Tous les bénévoles connaissent leurs rôles pour le jour J. Reste l’angoisse du temps qu’il fera et le risque financier si le succès n’était pas au rendez-vous.

Heureusement le 29 juillet et le 4 août le beau temps était de la partie et les spectateurs et amateurs de pastorale sont venus nombreux.

Une fois de plus le spectacle grâce à la mobilisation des acteurs, des bénévoles et de tout un village a perpétré la culture basque et souletine avec son théâtre unique et fait passer le message pour que l’âme Basque ne meure pas.

Beñat Lasserre

*l’une des sept provinces basque

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